Le Pacte ou la casse du statut d’enseignant

jeudi 31 août 2023


Nous avons déjà dit, dans le numéro précédent de Contrepoint, la nécessité absolue de refuser collectivement le PACTE. Nous ne détaillerons donc pas ici, et c’est volontaire, les différentes missions concernées et leur rémunération. Au contraire, nous développerons des raisons de s’élever contre cette mesure qui, nous le répétons, ne constitue absolument pas une revalorisation de notre rémunération.

Le Pacte dessine de nouvelles perspectives quant à notre statut, le met en danger, l’attaque insidieusement et amène à une individualisation du métier : exit le collectif ! On préfère multiplier les missions des enseignants et disperser les forces. Le pacte, sous couvert d’un contrat, renforce le rôle du chef d’établissement qui s’apparente un peu plus à celui d’un manager.
En effet, les volontaires devront signer, début septembre, une lettre de mission avec leur chef d’établissement. C’est donner à celui-ci un pouvoir qu’il n’avait pas jusqu’ici. Et un moyen de pression supplémentaire sur les plus précaires !
Cette contractualisation du métier s’accompagne d’un salaire à la tâche, bien loin de notre statut d’enseignant qui répond normalement à des obligations de service en préservant la liberté pédagogique et d’organisation des maîtres. Il est fort à craindre que les signataires du Pacte se retrouvent rapidement corvéables à merci, avec des créneaux d’astreinte hebdomadaires, sous peine de ne pouvoir, autrement, effectuer les heures de remplacement de courte durée sur lesquelles ils se sont engagés.
Avec le Pacte, c’est tout notre rapport au travail qui se trouve modifié : finie la confiance, bienvenue le contrôle ! En effet, le maître signataire du Pacte devra périodiquement rendre des comptes au chef d’établissement et ce dernier pourra suspendre la rémunération associée s’il estime que l’engagement du maître ne pourra pas être tenu dans l’année scolaire.
Le Pacte, vision capitaliste de l’enseignement, contre les conquêtes syndicales :
Présenter les formes anciennes de travail comme des éléments de modernité est devenu un classique du marketing patronal et étatique : les fonctionnaires, les statuts, le droit du travail, tout ça est bien archaïque ! La modernité, c’est le travail indépendant, l’individualisation, la mission !
Rappelons que le paiement à la tâche ou à la mission est l’une des premières formes de travail en régime capitaliste. Plus une personne pouvait ramasser de fruits, par exemple, et plus elle était payée.
Ces formes de travail n’ont pas disparu, comme l’illustrent les primes des commerciaux et les livraisons des chauffeurs ubérisés. Mais elles ont été mises en minorité dans la rémunération du salariat dont l’immense majorité relève d’une convention collective ou d’un statut.
Ces conquêtes du mouvement syndical sont aujourd’hui attaquées ; le Pacte est un des éléments de cette attaque, et pas un des moindres.
En donnant des missions qui nécessiteront un contrôle de la part du chef d’établissement, le Pacte vient demander aux enseignants de goûter au salaire à la mission. Nous nous retrouvons à la place des personnes qui, ayant des revenus insuffisants, ont accepté de devenir chauffeurs UBER. En négociant au rabais les salaires des enseignants, on les pousse à subir leur métier, à choisir le pire : le Pacte fonctionne sur le principe de la servitude volontaire.
À quel prix se vend la liberté des enseignants ? L’enjeu est la liberté contre le contrôle. Le moyen est l’argent. Le prétexte est la revendication de hausse des salaires.

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