Les parts fonctionnelles de l’ISOE/ ISAE : de l’argent public distribué à l’enseignement privé sans (presque) aucun contrôle.
Tous les établissements privés sous contrat ont bénéficié d’une enveloppe de parts fonctionnelles de l’ISOE (1250 € annuels) dans le cadre du Pacte enseignant. Cet octroi de parts fonctionnelles a le plus souvent dépassé les besoins des établissements qui ne les ont en général pas refusées pour autant.
Au départ, ce dispositif avait pour but principal de pallier le manque d’enseignants par des remplacements de courte durée (mission RCD) mais, au fur et à mesure des informations transmises par le rectorat, on s’est rendu compte que l’objectif du remplacement de courte durée devenait secondaire, alors même que dans les textes il est estampillé « prioritaire ».
Le deuxième but du Pacte enseignant était de valoriser et donc de rétribuer des missions innovantes. Or l’on s’aperçoit que, dans certains établissements, des services précédemment rémunérés par les organismes de gestion comme le soutien scolaire ou l’étude du soir en premier degré sont maintenant pris en charge par les parts fonctionnelles accordées aux enseignants.
On constate aussi que cet effet d’aubaine profite à des missions dites innovantes dont on a du mal à voir l’intérêt pédagogique, comme des ateliers de jeu d’échecs par exemple, ou le dédoublement de cours de spécialité au lycée !
Lors d’une récente rencontre avec l’administration, nous avons appris que les lettres de mission qui doivent consigner les engagements des enseignants dans le cadre de ce Pacte ne sont même pas signées par les enseignants. Seul.e la ou le chef.fe d’établissement remplit un simple titre sur une plateforme pour signaler la mission et l’octroi d’une ou plusieurs parts fonctionnelles. Cela signifie que les chef-fes d’établissement peuvent accorder des parts fonctionnelles sans qu’aucun projet ne soit présenté au rectorat puisque ce dernier ne le demande pas, et même sans que les enseignants n’en soient informés puisqu’ils ne signent pas de document ! Dans les faits, de nombreux collègues nous ont déclaré ne pas avoir reçu de lettre de mission et ne pas connaître les modalités précises de leur engagement.
Pire encore, face à nos demandes sur le processus qu’il comptait mettre en place pour contrôler l’utilisation de cet argent public, le rectorat a répondu, un peu embarrassé, qu’il attendait les instructions ministérielles et procéderait par « échantillonnage » sans que l’on sache à quoi cela correspondra. Que peut-on contrôler si aucun descriptif des projets n’est transmis au rectorat - à part un titre à une mission-, si aucun bilan n’est exigé ? Qui contrôlera les chef.fes d’établissement eux-mêmes quand ils/elles se sont octroyé une part fonctionnelle de l’ISOE ?!
Ces parts fonctionnelles constituent donc une véritable aubaine pour les chef-fes d’établissement qui se voient accorder un pouvoir discrétionnaire supplémentaire en les distribuant sans pratiquement aucun contrôle. Ils vont pouvoir par ailleurs réduire les frais de fonctionnement de leurs établissements en rétribuant des missions précédemment payées par les organismes de gestion à l’aide de parts fonctionnelles qui sont de l’argent public, et cela sans aucune contrepartie sur la mixité sociale ou la tarification sociale par exemple.
Le CréSEP Sundep Solidaires continue de dénoncer ce Pacte qui ne constitue absolument pas une revalorisation de la rémunération des maîtres et place l’enseignant dans un contrat direct avec son/sa chef.fe d’établissement, ce qui va à l’encontre de notre statut. Alors qu’il a été très largement boycotté dans les établissements publics, où le ZERO PACTE a été massivement décidé, le succès de ce dispositif dans l’enseignement privé sous contrat ne fait que confirmer l’extrême précarité des maîtres non titulaires qui ont un réel besoin d’argent pour vivre décemment.
En ce début d’année 2024, faisons le vœu que le Pacte disparaisse dès la rentrée prochaine et que la rémunération de tous les enseignants soit revalorisée de manière significative et sans aucune contrepartie !